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  • Photo du rédacteurLucas G. Blanchard

Eraserhead (1977)


Eraserhead est le premier film de David Lynch. C'est un petit film étudiant, filmé grâce à l'énorme budget de dix-mille dollars américains. Aujourd'hui, ce modeste film étudiant est lui-même étudié dans les écoles de cinéma, partout à travers le monde. Cet exploit est en majeure partie possible grâce au génie de Lynch.


C'est d'ailleurs la première œuvre de ce directeur que j'ai visionné, si l'on ne compte pas le fameux Dune de 1984, que Lynch à renier, au point de faire enlever son nom du générique. J'ai été instantanément frappé par la qualité de sa mise en scène, des plans, mais aussi du scénario dont il semble être le seul crédité. Finalement, je me dois de relever la débrouillardise ayant dû être déployée afin de créer un tel chef-d'œuvre sans budget. Les scènes sont certes simples à recréer et les décors sont triviaux, mais il n'empêche que 10 000 $ ne permet pratiquement rien, même pour l'époque. Je pense entre autres aux scènes au début du film, impliquant des effets visuels moindrement sophistiqués, ou encore à la marionnette du bébé dont la vraisemblance est plus qu'acceptable.


Néanmoins, le réel intérêt de ce film est le symbolisme qu'il emploie. À mi-chemin entre le fantastique et l'horreur, celui-ci s'inscrit vaguement dans la tradition du surréalisme, et est donc sujet à de nombreuses interprétations. Néanmoins, dans le cas de ce film, les interprétations sont rarement divergentes, et demeurent relativement rapprochées les unes des autres. Ainsi, il n'est pas question d'un surréalisme artistique comme on pourrait l'observer dans "un chien andalou", mais plutôt un symbolisme intentionnel et surtout conscient. Ainsi, il est clair que la première scène avec les spermatozoïdes et l'astéroïde est une présentation symbolique de la conception de l'enfant du personnage principal. De même, la dame dans le radiateur ne peut être qu'une représentation de la mort, incitant le protagoniste, soit au suicide, soit au meurtre de son propre enfant.


L'atmosphère générale est très sombre, et contribue à l'horreur de la situation. En effet, il y a quelque chose de presque kafkaïen dans la situation et dans la manière dont elle nous est rapportée. Je n'ai donc pas pu m'empêcher de penser à "la métamorphose", en voyant le bébé, et l'étrange horreur qu'il provoque chez le spectateur. Il n'est pas simplement question de bodyhorror, mais bien d'une dualité entre le dégout et le sentiment paternel/maternel instinctif, rappelant aussi la situation présentée dans "la mouche", mais d'une manière plus intensément malsaine compte tenu du fait que le bébé est la progéniture même du personnage principal, établissant ainsi un fort lien entre les deux personnages, malgré tout. D'une certaine manière, le bébé lui-même est un symbole, car sa forme presque spermatozoïdale rappel constamment le lien qui le relie au protagoniste. De plus, il montre à l'audience qu'il est ici uniquement question de la parentalité, et de l'horreur que représente celle-ci au personnage principal. Ceci, mêlé aux sombres décors industriels et à la bande-son qui ne semble jamais vouloir quitter nos oreilles, indique plutôt clairement que l'entièreté du film est un rêve, ou du moins une manifestation subconsciente des appréhensions du protagoniste. De plus, filmer l'entièreté du film en noir est blanc, souligne aussi cette volonté de présenter le film comme un vaste cauchemar.


C'est donc pour toutes ces raisons que j'ai beaucoup aimé ce film. S'il peut être considéré par certains comme un projet prétentieux et outrageusement malsain, je crois personnellement que les éléments horrifiques et le symbolisme "prétentieux" sont toujours pertinents au propos du film, n'allant jamais dans l'excès. Lynch va jusqu'au bout du thème et de son ambition, et c'est ce qui fait de ce film une très bonne expérience que je recommande vivement.





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